A Failing Devotion "S/T" (Métalcore/Nao Noise Prod., Dream On Prod.)

Cet EP de quatre titres suffit à mesurer l’ampleur du quintet d’acharnés. Véritable ouragan tympanticide, l’écoute de cet EP est dévastatrice.
L’agressivité dégagée par le chant vient subjuguer des parties guitare TGV, lancées sur les rails d’un batteur qui ne paye pas la feutrine de ses pédales de grosse caisse.
Chaque morceau présente aussi des moments d’éclaircies, pour permettre à chacun de reprendre ses esprits avant d’affronter la prochaine tempête.
Malgré le jeune âge de cette formation dunkerquoise, l’alchimie musicale sent le vécu et agit en véritable dynamite auditive.

Concernant le chant lead, exécuté par Max, il se présente puissant, de qualité et d’assez bonne créativité en apparaissant de manière avisée sur les compos. Le chanteur lâche de temps en temps quelques chorus bien nerveux, en appui à son chant déjà rentre-dedans, ce qui tranche d’autant plus avec la sensibilité qui se dégage des parties mélodiques. On l’apprécie d’autant plus car il sait laisser la place aux passages purement instrumentaux (comme peut l’être l’intégralité du tire Interlude) et aux autres interventions chantées de ses comparses.

En tant qu’adepte du genre métalcore, j’ai largement apprécié les lignes claires et mélodiques du bassiste qui interviennent de façon passagère sur chacun des morceaux. Si ces mélodies vocales apportent une véritable valeur ajoutée aux compositions, les puristes du hardcore, eux, en seront sans doute rebutés.  
D’ailleurs, la discrétion de ces interventions vocales séduisantes tant en volume qu’en fréquence, n’est-il pas le signe d’un coté mielleux pas totalement assumé ?

Pour ma part, l’oreille se prête volontiers au jeu des questions réponses, chant clair / chant hurlé, avec des passages rafraichissants comme l’indélébile « Do you feal so…» de Destiny.  Parfois, on ne sait plus qui de l’œuf de Max ou de la poule de Fred a composé la ligne en premier… Comme dans  Summer’s Gone, où le premier refrain est hurlé façon mamie Andrée par le ravageur Max, et lorsqu’il refait son apparition, la même ligne est relayée par le bassiste,  sauce suave.
Le chant du bassiste se révèle d’autant plus à l’aise sur les transitions ou les parties à la limite de l’acoustique, comme pendant le couplet qui précède les inoubliables « Do you hear my scream ? ».
Le dernier refrain de Summer’s Gone –annoncé par un break du tonnerre- est un condensé des aptitudes de chacun des chanteurs, jouant avec l’intensité des plages chantées entrecoupées par les interventions tapageuses de Max.
Les effets delay offrent un écho vocal ça et là, donnant du liant à cet ensemble de voix.

Enfin, la diversité des mélodies -claires et hurlées- que présente l’EP se complète par l’intervention d’un chant plus fédérateur, émergeant ponctuellement, avec des chorus bien francs et nets comme sur Catharsys (0’40).
En  bref, ces différents chants biens agencés et plutôt inventifs rendent les compositions évolutives, aidés largement part les déclinaisons des guitares.

En effet, l’imbrication des guitares et leur riffs respectifs œuvrent parfaitement entre mélodie, complexité technique et puissance : des parties rythmiques rapides à la Parkway Drive ou Heaven Shall Burn, aux parties planantes à la Twin Atlantic et parfois sombres comme à l’intro d’Interlude, en passant par de jolis passages death ou heavy comme à mi-Destiny et quelques moshparts qui n’en sont jamais vraiment.
Cette alchimie des styles joue avec des breaks, des crescendos, des ralentis et des complications techniques que les gratteux se plaisent à rajouter. On n’est pas dans une ingéniosité brillante d’originalité, mais on s’en rapproche.
J’apprécie aussi les touches d’humour comme la clotûre de Destiny, qu’on pourrait croire sorti d’une vieille partie de Street Fighter gagnée.

Quand à la section rythmique –basse/batterie- on est sur des bases fiables, qui en imposent. Interlude est une vitrine de leur potentiel instrumental. J’apprécie le jeu syncopé qu’ils y proposent, où il me faudrait réviser mes cours de solfège rythmique pour déceler qui y joue à l’endroit d’à l’envers. La double pédale du batteur est aussi bien rentabilisée, et sa petite cymbale se fait habillement remarquée (Destiny à 3’55).

D’une manière générale, A Failing Dévotion dévoile bien autre chose qu’un support de défoulement, une certaine émotion y a aussi sa place, n’en déplaise à certains.

Par ailleurs, j’adresse un coup de chapeau à la qualité de l’enregistrement – R3MYBOY- qui optimise les compos du groupe, avec un son boosté plein régime… et je reconnais bien là la qualité des productions de Dream On et Nao Noise.

L’art work du quintet réalisé par Koops est aussi convaincant, faisant même froid dans le dos concernant l’avant de la pochette. L’arrière, lui, laisse entrevoir les visages des créateurs de l’extrême. On reste dans le basique noir et blanc, avec des teintes et le souci du détail, à l’image d’A Failing Devotion donc.

D’une manière générale, le morceau Catharsys de ce premier EP regroupe en son sein tout ce que le quintet présente de meilleur : l’alliance de la rage viscérale du hardcore et la rigueur du métal, rajoutez-y une once de mélodieux et un brin de nuance, et vous obtiendrez l’intensité évolutive du métalcore d’A Failing Devotion.
Chloé