Sliver "Disobey Giants" (Rock Indie)

L’album « Desobey Giants » sent la démarche professionnelle à plein nez. Tous les ingrédients sont réunis pour proposer à l’auditeur un produit respectable. D’une part, l’appel à la résistance qu’il constitue (son manifeste de 12 pages, les slogans scandés, son clip inspiré du mouvement Occupy à San Francisco) qui prouve son engagement sociétal et d’autre part, le travail de cohésion instrumentale qui atteste d’un certain savoir-faire. Le tout masterisé par  Pelle Henricsson, le grand manitou des albums de Refused, pour une galette plutôt aboutie.
Le style se situe à la croisée d’univers musicaux distincts, un coté rock indie à l’accent underground, une pointe de grunge, des riffs metals bien accrocheurs (Sleepwalkers), quelques notes de piano, un soupçon de cris hardcore mais surtout, une bonne dose de keyboard et de samples électro-synthétiques.
L’importance du détail rejaillit sur les douze titres que comporte l’album, le tout se présentant comme fluide et cohérent notamment grâce au travail d’arrangement.

Si la fusion de ces éléments est bien exécutée, l’omniprésence des effets freinera mon plaisir d’écoute. Mon côté puriste les préfère discrets et ponctuels, mais il s’agit ici d’une base structurelle, identité même du groupe. Invisible commettee et Polaris m’amèneront tout de même à sourire par leurs brèves parties électroniques qui me rappellent le générique de Capitaine Flam !

L’esprit lancinant de certaines parties est racoleur, hypnotisant même : « We are invisible, We are invincible » voilà qui est mémorisé !
Le chant a sa part de responsabilité dans ces rengaines car son interprétation « plaintive » opte pour des lignes sommaires assez répétitives, collant épisodiquement de trop à la mélodie instrumentale (The future). Ben joue avec les frontières de la justesse (We shall live à 1’10, « Never sleep again » de Sleepwalkers inc.) et use d’effets pour diversifier ses interventions.
Ainsi le mégaphone –marque de fabrique de Sliver- fait son apparition sur la plupart des morceaux dans le but de mettre en  avant des cris venus tout droit des entrailles de l’univers. 
D’une manière générale, l’attaque vocale déterminera l’ambiance du morceau (grunge pour Polaris, punk-rock pour Bring down the casino) et j’ai eu plaisir à entendre les chorus donner du coffre (« We believe » de Polaris) ou les samples de voix habillement trouvés (Desobedience 101) pour introduire ou clôturer les morceaux.
Ben dévoilera sa voix sans effets sur la chanson assez intimiste The Partisan, jusqu’à même se risquer en français, accompagné par ses comparses. Je trouve que son chant est davantage en valeur dans les parties psychédéliques comme à la 40ième seconde de Sleepwalkers Inc. ou encore lorsqu’il s’exécute dans les graves comme sur The future.

Attention toutefois à l’aspect cacophonique de certains passages où les effets s’accumulent avec plusieurs lignes de chant (Small is beautiful, The invible committee ).
The quiet riot est un bref moment d’accalmie, uniquement instrumental. Un  répit appréciable.

Enfin, petit bémol pour le son attribué à la basse ; cette dernière est souvent trop discrète, confondue avec la guitare (The curtains are draw), manquant de rondeur (The quiet riot) ou parfois « salit » de manière exagérée (Bring down  the casino).

Pour résumer : Sliver, c’est l’âme d’un résistant dans un corps de musicien usant du mégaphone pour plaider la juste cause.  La forme est propre, le fond est humain.
Chloé